AP'titude

Octobre 2021

Informations à destination des services MJPM

Sommaire

EDITO

Vers une définition de la mission des MJPM

Nous sommes à la veille d’une réforme de la Protection Juridique des Majeurs. Au sein du Groupe de Travail Interministériel (GTI) constitué pour y réfléchir, ont lieu des discussions, notamment sur une définition de la profession de Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs. Des débats ont lieu. Les MJPM font-ils de l’accompagnement ? Sont-ils des auxiliaires de justice ? Des avis divergent.

Il me semble que trop souvent les missions des mandataires sont définies par ce qu’ils ne font pas (« nous ne remplaçons pas les assistantes sociales », « nous ne sommes pas éducateurs », « nous n’obligeons pas les personnes protégées à se soigner » etc.). Cette difficulté à définir accentue les problèmes de compréhension avec les partenaires qui méconnaissent la réalité des missions et les limites d’intervention.

Or, « une collaboration étroite entre les différents acteurs est nécessaire. Ceux-ci doivent avant tout se connaître, s’inter-reconnaître, c’est à dire se faire confiance dans leurs postures et compétences respectives. Ils doivent éviter de se renvoyer la responsabilité de la décision[1] » et ne pas nier la capacité des personnes protégées à être responsable d’elles-mêmes.

Les MJPM ne sont pas « tout-puissant ». Leur présence physique n’est pas requise de manière systématique et ils n’ont pas à intervenir dans tous les domaines de la vie des personnes protégées. D’un côté, il y a le cadre juridique, de l’autre, l’adaptation aux personnes et à leur environnement. Cela s’appelle l’individualisation de la mesure. La connaissance des professionnels des personnes qu’ils accompagnent, de leurs besoins et de leurs aptitudes à décider ; en même temps que leur expertise en matière de droit de la protection juridique des majeurs, leur permettent de savoir où est leur place et de s’adapter à chaque réalité rencontrée.

Une réécriture de l’article 471-1 du code de l’action sociale et des familles relatif au rôle des mandataires judiciaires à la protection des majeurs, est réfléchie au sein du GTI. L’article devrait être complété ainsi :

La mission des MJPM « vise à garantir les libertés fondamentales de la personne protégée, à soutenir l’exercice de ses droits et à promouvoir son autonomie, autant qu’il est possible, et son aptitude à décider en s’assurant de l’expression de sa volonté. Elle est aussi d’assurer, dans le cadre du mandat qui leur a été confié, la protection juridique de la personne et de ses intérêts patrimoniaux et de contribuer à son accompagnement en lien avec les autres professionnels et intervenants.

Cet accompagnement de la personne, qui s’effectue sans préjudice de l’accompagnement social auquel elle peut avoir droit, est destiné principalement, à consolider certains actes juridiques, vérifier l’existence et la manifestation d’un consentement, et aider la personne à faire valoir ses droits fondamentaux. »

Si ce projet abouti, il y aurait donc une définition légale de la mission et de l’accompagnement par les MJPM.

A l’UTRA PJM, j’ajoute et défends la notion d’accompagnement protectionnel pour qualifier la spécificité de l’accompagnement dans le cadre d’un mandat judiciaire.

L’accompagnement protectionnel se distingue de l’accompagnement social car c’est un accompagnement contraint par une décision de justice qui en fixe les limites. Son objet est la protection juridique de la personne majeure et de ses biens que son état ou sa situation rend nécessaire et a pour finalité l’intérêt de la personne protégée. Cet accompagnement doit favoriser, dans la mesure du possible, son autonomie.

L’accompagnement protectionnel est une notion qui résume le positionnement des Mandataires Judiciaires à la Protection des Majeurs qui interviennent dans un triple mouvement :

-A la fois à l’écoute de la fragilité et des forces des personnes protégées et de leurs désirs et besoins ;

-Tout en promouvant, autant que possible, leur autonomie, leur responsabilité et la maîtrise de leur vie ;

– Et en étant garant, par leur expertise, des éléments de réalité nécessaires à la protection : juridique, financière et patrimoniale, sociale, médicale, etc. Domaines d’expertises qui sont susceptibles de s’affronter en termes de suprématie et qui génèrent des questions éthiques fortes dans la pratique.

La notion d’accompagnement protectionnel permet de souligner que l’intervention des MJPM est une pratique professionnelle éclairée, qui est construite et négociée avec les personnes accompagnées, bien que la décision d’une mesure de protection soit imposée par le Juge.

Cette notion implique que la recherche de protection de la personne ne doit pas effacer sa volonté au profit de celle des MJPM. Ainsi, la recherche et la prise en compte de la volonté de la personne et le respect de ses droits et libertés fondamentales en sont les fondements.

Cette conviction est ouverte au débat, qui pourra nourrir les réflexions au sein de l’UTRA PJM et au-delà, pour l’ensemble du secteur.

Charlotte Rabine – Déléguée Générale

[1] Pierre Bouttier, Pour une approche éthique de la protection juridique, intervention pour la MAIA des Yvelines le 29/06/21

ACTUALITE DE LA PJM

Le Groupe de Travail Interministériel

Formation de mandataire pour la tutelle et la MJPM

Après Anne Caron-Déglise, l’ANDP (Association Nationale des Délégués et Personnels des services mandataires à la protection des majeurs), la CNMJPM (la Chambre Nationale des Mandataires Judiciaires à la Protection des Majeurs) et la FNMJI (Fédération Nationale des Mandataires Judiciaires Indépendants à la protection des majeurs) ont annoncé leur départ du Groupe de Travail Interministériel relatif à la réforme de la Protection Juridique des Majeurs venant ainsi assombrir l’image des travaux en cours.

« Nous avons regretté le manque de transparence des objectifs, l’absence de recherches documentées et d’explications claires permettant d’alimenter la réflexion et le débat. Nous avons, de nombreuses fois, fait part de l’absence de méthode de travail et d’une désorganisation toutes deux irrespectueuses, ne permettant pas d’avancer sur les débats de fond. Nous avons regretté que le groupe ne soit pas porté par une volonté de concertation, d’écoute, de conciliation et d’apaisement, d’une voix neutre et objective, comme cela fut le cas pendant de nombreuses années avec la Direction Générale de la Cohésion Sociale.» [1] 

Les réflexions portent sur la définition de la profession de MJPM, une réforme de la formation initiale et continue, l’instauration d’une obligation pour les MJPM de signaler toute atteinte aux droits et libertés des personnes protégées aux autorités administratives et judiciaires compétentes et l’instauration d’une instance nationale des droits et de la protection des adultes vulnérables.

Nous espérons qu’une réforme verra effectivement le jour et surtout, qu’elle tiendra compte des besoins, des réalités et des difficultés de terrain des acteurs de la PJM. Il est nécessaire qu’elle soit corrélée à une augmentation des moyens pour une meilleure reconnaissance de l’ensemble des salariés des services MJPM. C’est ce que nous avons signifié dans une lettre ouverte aux décideurs publics diffusée début octobre signée par toutes les associations adhérentes de l’UTRA PJM.

[1] ANDP, CNMJPM et FNMJI, Communiqué de presse du 5/10/2021.

DROITS ET PRESTATIONS

Les principales mesures à destination des particuliers contenues dans le PLFSS 2022

Emploi de mandataire judiciaire

Le site « Service public »[1] propose un résumé des principales mesures pour 2022:

Contraception gratuite pour les femmes de moins de 25 ans : le 1er janvier 2022, l’Assurance maladie prendra en charge à 100 % et sans avance de frais, le coût de la contraception et les actes qui y sont liés (une consultation par an avec un médecin ou une sage-femme et les examens biologiques potentiels).

Accès facilité à la complémentaire santé solidaire (CSS) : la CSS sera automatiquement attribuée aux bénéficiaires du RSA sans aucune démarche, sauf opposition expresse de leur part. Les démarches des bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) seront aussi simplifiées.

Renforcement du service public des pensions alimentaires : afin de renforcer la prévention et la lutte contre les impayés de pension alimentaire, sauf refus des parents, toutes les pensions alimentaires nouvellement fixées seront versées par l’intermédiaire de l’Agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires (Aripa). Ce service d’intermédiation s’appliquera, le 1er mars 2022 pour les divorces devant la justice fixant une pension alimentaire, le 1er janvier 2023 aux autres types de décisions de justice concernant une pension alimentaire et aux divorces par consentement mutuel.

Versement en temps réel du crédit d’impôt et des aides sociales liés aux services à la personne : généralisation du crédit d’impôt instantané en 2022. Les contribuables pourront percevoir immédiatement les aides et crédits d’impôts dont ils bénéficient pour les coûts liés aux services à la personne. L’avance de trésorerie effectuée par les particuliers sera totalement annulée. Cette mesure entrera en vigueur en janvier et avril 2022 pour les services à domicile relatifs aux tâches ménagères ou familiales (femmes de ménage, jardiniers, professeurs pour des cours particuliers…).

Accès aux soins visuels facilité : les orthoptistes pourront, sans prescription médicale, réaliser des bilans visuels simples et prescrire des lunettes et lentilles de contact pour les corrections faibles.

Parcours de soins mieux coordonnés : il est prévu la généralisation de l’expérimentation de dépistage du VIH en laboratoire de biologie médicale, sans ordonnance.

Prise en charge de la télésurveillance par l’Assurance maladie : la télésurveillance permet à un professionnel de santé d’interpréter à distance les données nécessaires au suivi médical d’un patient et, le cas échéant, de prendre des décisions pour la prise en charge de ce patient. Une tarification forfaitaire sera mise en place pour les personnes atteintes de cinq pathologies chroniques (diabète, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire et prothèses cardiaques implantables à visée thérapeutique). La généralisation de la télésurveillance est censé permettre d’améliorer le suivi et la qualité de vie des malades chroniques en réduisant notamment le nombre de leurs déplacements.

Favoriser le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie : il est prévu une revalorisation des salaires des employés des services d’accompagnement à domicile, une mise en place d’un tarif plancher de 22 € pour les services de soins infirmiers à domicile (SAAD), une restructuration des services d’accompagnement à domicile et garantie de leur meilleur financement partout sur le territoire, le renforcement de la médicalisation des Ehpad et des liens avec les services d’aide à domicile.

Vers un contrôle systématique du juge en cas d’isolement et de contention : Au-delà de 48 heures pour une mesure d’isolement et de 24 heures pour une mesure de contention, le directeur de l’établissement devra en informer sans délai le JLD. Le juge pourra se saisir d’office pour mettre fin à ces mesures.

Dans le cas où le médecin voudrait poursuivre une mesure d’isolement au-delà de 96 heures ou une mesure de contention au-delà de 72 heures, il devra en faire la demande expresse au JLD avant l’expiration de ces délais. Le juge vérifiera alors si les conditions normales d’isolement ou de contention sont réunies avant leur prolongation.

[1] Service public- PLFSS pour 2022 : les principales mesures

 

MAIS AUSSI ...

Les assises de la santé mentale

Assurer la protection juridique d'une personne en situation de handicap

Les assises de la santé mentale se sont tenues les 27 et 28 septembre 2021. Elles ont réuni des acteurs concernés dans un contexte épidémique. Ce rendez-vous ambitionnait de dresser un état des lieux partagé de la prise en charge de la santé mentale des français, de l’offre de soins en psychiatrie et de l’accompagnement qui leur est proposé.

Un dossier de presse intitulé « Une ambition refondée pour la santé mentale et la psychiatrie en France- Pour une société qui comprend, pour une société qui agit » a été publié et est accessible au lien en bas de page[1].

L’état des lieux est qu’une personne sur cinq est touchée chaque année par un trouble psychique, soit 13 millions de français.

64 % des français ont déjà ressenti un trouble ou une souffrance psychique et 30 % ont dans leur entourage une personne concernée par une souffrance psychique.  Le taux de suicide en France est l’un des plus élevés des pays européens de développement comparable et les français sont les plus gros consommateurs au monde de psychotropes.

Pourtant, qu’il s’agisse de détresse psychologique, plus ou moins profonde, plus ou moins durable, ou de troubles psychiatriques avérés, la santé mentale reste encore aujourd’hui un sujet largement tabou.

Le gouvernement s’engage à :

  • encourager l’autodétermination des personnes ayant un handicap psychique et le soutien par les pairs
  • aller vers les publics les plus vulnérables pour repérer leurs souffrances psychiques et garantir leur prise en charge sanitaire et sociale
  • repérer et agir plus précocement pour la santé psychique des enfants et des jeunes
  • renforcer la couverture médicale en santé mentale et son accessibilité
  • investir dans la recherche en santé mentale et les opportunités offertes par le numérique

Le gouvernement annonce une série de mesures :

    • une prise en charge pour l’ensemble de la population, un forfait de séances chez le psychologue sous certaines conditions
    • le développement des premiers secours en santé mentale
    • des mesures spécifiques pour les enfants et adolescents
    • l’augmentation sur 3 ans de 400 postes dans les CMP
    • la création de 20 équipes mobiles pour la prise en charge des personnes âgées en ehpad et dans les structures médico-sociales
    • la création de 12 postes d’enseignants chercheurs en psychiatrie supplémentaires
    • la création d’un institut de stimulation cérébrale et le centre e-CARE de prise en charge et de recherche sur l’enfant

 

On peut craindre que la création de 400 postes supplémentaires en CMP pour adultes sera insuffisante pour répondre aux besoins de l’ensemble des territoires.

[1] Une ambition refondée pour la santé mentale et la psychiatrie en France, les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie, septembre 2021.